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vendredi 12 août 2011

Face à la mort


J'ai été touchée d'apprendre la mort d'Arnaud Desjardins (18 juin 1925 - 10 août 2011) et cela m'amène à vous partager ce texte écrit par Gangaji en 2002 après la mort d'un de ses amis.


Vous mourez en ce moment même.

Tout ce que vous pensez être est en train de mourir maintenant.

Vous-même, en tant que corps individuel, en tant que monde, en tant qu'expérience, vous mourez en ce moment.

Plusieurs morts surviennent tous les jours.

Il y a la mort de chaque moment, et la mort tous les soirs quand le sommeil vous prend.

Il y a mort quand une relation se termine ou quand un enfant quitte la maison.

Cependant la mort dont je veux vous parler est la mort physique.

Dans notre culture, cette mort est généralement celle qu'on évite le plus, ce qu'on nie le plus.

Nous sommes tellement terrifiés par elle, tellement effrayés de n'être rien.

Bhavo est mort. Il est parti tranquillement dans son sommeil, alors que trois amis étaient auprès de lui et que j'étais en route pour aller le voir. Cela a été si précieux, un tel cadeau d'être avec lui les semaines avant qu'il meure et ce matin-là d'accompagner son corps dans la mort. Ce n'était pas là une théorie sur la mort, c'était vraiment d'être dans la chambre avec la mort. La mort qui s'approche, qui s'approche clairement, et puis la mort là, présente, s'emparant de l'énergie de vie. C'était d'être avec un corps quand rien n'y est fait pour l'embellir, quand il a la pâleur de la mort. Juste la vérité crue de la mort de la forme. Accepter d'être en présence de la mort nue, non déguisée, révèle l'absolue, l'indéniable beauté et la présence de ce qui est éternellement vivant. Bhavo a donc disparu, ce que nous connaissions de la forme de Bhavo n'est plus. Son corps a été incinéré et maintenant il est réduit en cendres; il a disparu. Nous aurons tous des souvenirs de Bhavo, des souvenirs de sa charmante personnalité, de ses sautes d'humeur, de toutes les dimensions de ce qu'était Bhavo.

La présence qui animait sa forme est exactement la même présence qui anime votre forme, qui anime toute forme. S'éveiller à soi-même en tant que cette présence, c'est accepter d'affronter la mort dans toutes les formes, y compris ce que vous appelez votre propre forme. Il a laissé un cadeau immense à ceux d'entre nous qui ont accepté de l'accompagner dans ses souffrances physiques jusqu'à la fin. Il y avait quelque chose de très précieux dans sa mort, parce qu'il savait qu'elle approchait. Il ne niait pas la mort. Cela ne veut pas dire qu'il ne combattait pas la maladie ; il s'est battu, faisant tout ce que lui et ses médecins pensaient possible. Il ne s'agit pas de ne pas combattre la maladie. Il s'agit de savoir que vous combattez la maladie tout en sachant que la mort viendra à son heure. Et d'avoir la capacité, comme Bhavo l'a eue, de faire face à sa propre fin. Quand il a entendu les mots :« Nous avons perdu la bataille, le combat est terminé », le lendemain matin il était mort.

Plusieurs personnes viennent à la recherche spirituelle pour obtenir quelque chose, mais la vraie réalisation spirituelle est atteinte par l'abandon conscient de tout. Que signifie de tout perdre ? Dans la mort, nous perdons tout : nos familles, nos amoureux, notre histoire, notre passé, notre futur. En acceptant de tout perdre consciemment, la vérité de soi-même est révélée.

Heureusement, Bhavo n'a pas eu à attendre que la maladie s'empare de son corps pour affronter cette perte.

Ainsi il a pu mourir libre, il a pu mourir en paix, perdant quelque chose de très précieux, mais gagnant plus encore que tout ce qui puisse être perdu. Il m'a semblé que ceux d'entre nous qui étaient avec lui ce jour-là, avec son cadavre couleur de cendres, ont ressenti une inconcevable, une incompréhensible joie d'être. Bhavo, dans sa mort, a été un cadeau pour nous. En vérité, il avait été un cadeau pour nous longtemps avant, parce qu'il avait fait face à la mort bien avant que la mort physique ne vienne. Sa vie comme sa mort ont été finalement, relativement et absolument le même cadeau.

Nous allons tous mourir un jour ; il n'y a pas de naissance sans mort.
Cependant, en ce moment même vous avez l'occasion d'affronter la mort avant que votre corps ne meure, de reconnaître votre amour pour le corps, votre attachement à la forme physique et de laisser cet attachement mourir. C'est le fait de s'identifier à tort à la forme physique qui doit mourir. Et, à travers cette mort, vous vous éveillez à la vérité de ce que vous êtes véritablement. Si vous acceptez de vous arrêter un seul instant et de mourir à cet attachement, il est possible qu'il vous reste au moins un peu de temps pour découvrir ce à quoi ressemble la vie quand on a fait face à la mort. Alors vous pourrez passer le reste de votre vie à partager votre découverte avec les autres. Il y a une telle faim, une telle soif du nectar qui vient de cette reconnaissance.

Pour mourir de cette façon, il faut d'abord découvrir le mécanisme de la résistance.

Par exemple, quelle est la pensée sur laquelle repose la croyance que « je ne peux pas affronter la mort tout de suite ? » La résistance à faire face à la mort vient de la pensée effrayante qui dit « je n'existerai plus. » Je comprends cette peur.

Plusieurs l'ont dit, et je le dis moi aussi : « Vous êtes l'existence même. »

Je ne vous demande pas de croire ce que je dis, mais je vous encourage à vraiment faire face à la peur de ne pas exister, à plonger dans l'idée inconcevable que vous puissiez ne pas exister.

Généralement, nous nions cette possibilité, mais de l'explorer véritablement, de se demander « qui ou qu'est-ce qui n'existera pas ? », voilà ce qu'est la recherche de soi (Self-Inquiry).

On peut dire que vous êtes la Conscience Rayonnante, que vous êtes la Lumière, la Vérité, Dieu ou la Beauté. Cependant, il vous faut vous reconnaître vous-même comme tel, pour vous-même.

Êtes-vous le corps ? Je sais que le corps est de toute évidence imprégné de vous, je ne dis donc pas que vous êtes séparé de votre corps.

Êtes-vous prêt à accepter de mourir dès maintenant, d'être mort à la personne que vous étiez, d'être mort à celle que vous pensez être et à celle que vous pensez devenir?

Maintenant, que reste-t-il ?